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DAKAR
Le Premier ministre Amadou Bâ, fort de sa casquette de ministre intérimaire des Sports qui ne lui attire pas que des ennuis, était le week-end dernier à Kaffrine. Officiellement, pour y présider une finale navétane. Mais, ce n’était pas que pour faire tapisserie : donner le coup d’envoi, regarder 22 chérubins courir derrière un ballon, remettre une coupe et puis refaire pleins gaz sur Dakar. Non, c’était plus que tout ça. Dans un contexte politique marqué par la difficulté du chef de Benno -celui-ci l’a avoué lui-même- à trouver le candidat de consensus, ce déplacement n’est pas anodin. D’abord, les navétanes, championnat populaire pour les connaisseurs, sont une importante tribune pour qui veut taper dans l’œil des jeunes qui constituent l’écrasante majorité de l’électorat. Ensuite, le choix de Kaffrine et de son maire est tout aussi important. Ministre de l’Urbanisme, entre autres charges, Abdoulaye Saydou Sow est le numéro deux de la Fédé de Foot et Président de l’As Kaffrine. Dans une perspective de drague gagnante de la jeunesse navétane, il vaut mieux avoir Sow avec soi que contre soi.
Et puis, tout le monde aura remarqué que Amadou Bâ a mobilisé une douzaine de ministres, presque le tiers d’un gouvernement qui en compte une quarantaine. Par cette mobilisation exceptionnelle, Amadou Bâ met la pression maximale sur le chef de Benno, Macky Sall, et sur son sergent recruteur et missi dominici, Moustapha Niasse. Mais également sur les ministres qui l’accompagnent eux-mêmes qui, par ce geste, lui ont fait publiquement allégeance et, par conséquent, se sont déterminés contre ses concurrents. Et sur ce registre, la surprise du chef aura été de voir Cheikh Oumar Anne, rival de son rival, Abdoulaye Daouda Diallo, aux côtés de Amadou Bâ. En politique, comme dans d’autres domaines, l’ennemi de mon ennemi est mon ami. Cet ami, «le Thierno de Ndioum», comme l’appellent ses feddayin, en cas de primaires internes entre Bâ et Diallo ou même pire, en cas de rébellion ou échappée solitaire de l’un ou de l’autre, peut servir d’armure au chef du gouvernement.
Retour de manivelle
Tout compte fait, cette sortie politico-sportive, calculée au millimètre près, aura été un bon coup de com’. Outre le fait qu’elle a fait les gros titres de certains quotidiens du lendemain, elle lui aura permis de compter ses amis au sein du gouvernement mais aussi de mettre le grappin sur des ministres-maires comme Abdoulaye Saydou Sow et Cheikh Oumar Anne, chefs de fiefs, maitres de leurs terroirs et accessoirement grands électeurs. Elle permet aussi d’envoyer un signal fort au patron qui devra y regarder par deux fois avant de valider un choix autre que le sien.
Mais, comme si cela ne suffisait pas, voilà que le ministre de l’Agriculture et maire de Linguère y va de sa «douce» pression. Invité du JDD chez nos confrères d’Itv, dimanche 13 août, l’ancien ministre de l’Intérieur a indiqué, sans user de périphrases, qu’il n’est pas «prêt» à renoncer à sa décision de convoiter le choix des Sénégalais en 2024. «Je ne suis pas prêt à désister. J’ai déjà indiqué de façon très claire que je suis candidat», a-t-il rappelé avec force. «Je devais être candidat normalement en 2012, mais j’ai finalement choisi d’accompagner le Président Macky Sall à la conquête du pouvoir. (…) Maintenant qu’il est arrivé au terme de ses deux mandats, je pense légitimement prétendre présenter ma candidature, comme certains de mes collègues. C’est une nouvelle orientation que nous devons nous donner tout simplement», ajoute-t-il. Une manière sibylline, pour le maire de Linguère, de signifier au Président Macky Sall qu’une énième renonciation de sa part n’est pas à l’ordre du jour.
Pendant ce temps, Abdoulaye Daouda Diallo fait le tour des familles maraboutiques influentes, notamment du Fouta. Et laisse ses seconds mener campagne, tambour battant, sur les réseaux sociaux. Son homonyme, Abdoulaye Diouf Sarr joue la proximité dans la capitale.
Pour simplement dire que, à moins de sept mois de la Présidentielle, Macky Sall qui s’est libéré de la pression de la troisième candidature voit, comme un retour de manivelle, le suspense dans son camp lui en flanquer une autre.
Ibrahima ANNE
(Walf Quotidien)
